Le droit criminel s’appuie sur la prémisse selon laquelle seule une conduite volontaire entraîne la responsabilité criminelle. En ce sens, la peine, conséquence judiciaire du crime dont une personne est responsable, doit être proportionnelle par rapport à la gravité de l’infraction et au degré de responsabilité du délinquant.

Le cadre d’analyse applicable aux délinquants autochtones n’est pas une « réduction de peine fondée sur la race », il tient plutôt compte du degré de responsabilité, affecté par les facteurs systémiques et historiques. Notons que la proportionnalité de la peine est une condition essentielle à une sanction juste[1]. La détermination de la peine quant aux délinquants autochtones exige que le Tribunal examine certains éléments, à savoir : d’abord, les facteurs systémiques et historiques qui affectent le parcours d’un individu et, ensuite, les peines substitutives à la détention qui permettent d’atteindre les objectifs pénologiques. Alors que les premiers affectent la culpabilité morale du délinquant dans la perspective d’une peine proportionnelle juste et équitable, les seconds reconnaissent une différente conception de la justice et la façon de l’administrer[2].

Un des outils incontournables en matière de détermination de la peine est le Rapport Gladue, lequel vise à dresser le portrait du parcours d’un délinquant autochtone en commençant par le parcours de sa famille et de sa communauté. Les rapports se concentrent aussi sur les facteurs systémiques et historiques qui ont affecté l’individu. Le rapport Gladue permet d’adapter la peine au degré de responsabilité. De manière pratique, la confection d’un tel rapport se demande au Tribunal, à l’instar du rapport présentenciel, à l’étape de la détermination de la peine.

Enfin, la Cour Suprême du Canada a reconnu qu’ :

il y a une preuve que ce racisme largement répandu s’est traduit par une discrimination systémique dans le système de justice pénale. […] Les propos touchant l’étendue et la gravité de ce problème sont d’une fréquence troublante. […] Le système canadien de justice pénale n’a pas su répondre aux besoins des peuples autochtones du Canada - Premières nations, Inuit et Métis habitant en réserve ou hors réserve, en milieu urbain ou en milieu rural - peu importe le territoire où ils vivent ou le gouvernement dont ils relèvent. Ce lamentable échec découle surtout de ce qu’autochtones et non-autochtones affichent des conceptions extrêmement différentes à l’égard de questions fondamentales comme la nature de la justice et la façon de l’administrer.[3]

Pour conclure, la détermination de la peine du délinquant autochtone doit tenir compte de son degré de culpabilité morale pour être proportionnelle et, donc, juste. De manière pratique, l’outil qui permet de tenir compte des facteurs systémiques est le rapport Gladue.

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[1] R. c. Ipeele, 2012 CSC 13 (CanLII), [2012] 1 RCS 433, para 37.

[2] R. c. Ipeele, 2012 CSC 13 (CanLII), [2012] 1 RCS 433, para. 73-74.

[3] R. c. Gladue, 1999 CanLII 679 (CSC), [1999] 1 RCS 688, para 61-64.