1. Ton patron peut-il légalement recourir à l'utilisation de caméras de surveillance dans ton milieu de travail?

Oui, ton patron peut le faire. Cependant, il doit respecter certaines conditions d'utilisation.

2. Pour quelles raisons ton patron peut-il avoir le droit d'installer des caméras de surveillance?

L'arbitre Jobin a fixé quatre (4) principes essentiels en 2005, soit:

  1. La surveillance par caméra doit se fonder sur un ou des motifs réels et sérieux. Ton patron doit démontrer qu'il existe un problème actuel ou contemporain, substantiel et continu. Ce sera le cas, par exemple, d'une épidémie de vols ou de sabotages à répétition.
  2. Il doit exister une forte probabilité que la surveillance par caméra aide à régler ou élucider le problème éprouvé. Il s'agit du critère de nécessité. Il peut donner lieu à l'examen de moyens d'enquête alternatifs. Ces derniers devraient être inaccessibles ou inefficaces pour que ton patron puisse recourir à la surveillance par caméra.
  3. Il doit exister un lien direct entre le problème que ton patron cherche à résoudre et l'utilisation qu'il fait de la caméra. En d'autres termes, l'existence d'un problème n'autorise pas une surveillance générale à tous égards. Cette surveillance doit être dirigée sur le foyer du problème, aux endroits clés.
  4. La surveillance exercée doit porter atteinte le moins possible à ton droit comme salarié d'exercer tes fonctions sans être constamment capté par la caméra.

Réf.: Syndicat des cols bleus regroupés de Montréal, section locale 301, et Ville de Montréal (arrondissement Côte Saint-Luc/Hampstead/Montréal-Ouest) D.T.E. 2005T-507 (T.A.)

3. Ton patron peut-il recourir à l'utilisation de caméras pour surveiller ton comportement et ta productivité au travail?

Non, ton patron ne peut pas le faire.

4. Est-il permis à ton patron de surveiller constamment ton travail au moyen d'une caméra de surveillance?

"Ce qui est interdit, parce qu'il s'agit d'une condition de travail déraisonnable, c'est que ces caméras de surveillance soient constamment braquées sur des individus, épiant ainsi systématiquement leurs faits et gestes. Il s'agit alors d'une forme de harcèlement au même titre que si le contremaître s'installait en permanence auprès d'un salarié pour le surveiller pendant toute la durée de son travail.

Réf. Syndicat des cols bleus regroupés de Montréal, section locale 301, et Ville de Montréal (arrondissement Côte Saint-Luc/Hampstead/Montréal-Ouest) D.T.E. 2005T-507 (T.A.)

5. As-tu droit à la vie privée au travail?

Oui, mais ton patron peut quand même restreindre ton droit à la vie privée s'il existe une justification raisonnable, une fin légitime ou encore s'il peut conclure que tu as consenti à l'intrusion dans ta vie privée.

Réf.: Gazette (The) (Division Southam Inc.) c. Valiquette, (1997) R.J.Q. 30 (C.A.)

6. Certains trouvent banale la surveillance par caméra. Que doit-on en penser?

Non, leur utilisation n'est pas banale. La popularité grandissante des caméras dans les milieux de travail et leurs conditions d'utilisation méconnues donnent à l'employeur la possibilité de fixer des conditions arbitraires et négligentes qui contribuent à bafouer les droits et libertés des travailleuses et travailleurs. De plus, la Loi sur les normes du travail ne prévoit aucune disposition pour protéger convenablement les personnes qui subissent du harcèlement fait avec les caméras de surveillance.

7. Que peux-tu faire lorsque tu te sens surveillé de manière excessive par ton patron?

  1. Tu peux rédiger un carnet de faits;
  2. Tu peux rassembler la documentation que tu viens de consulter sur le site web et la transmettre à ton employeur;
  3. Tu peux prendre contact avec la Commission d'accès à l'information au 1-888-528-7741;

8. Peux-tu te reconnaître dans ce témoignage?

"Lorsque je faisais des gaffes, mon patron m'humiliait et me diminuait. Si nous parlions trop longtemps à un client, il nous avertissait. Quand on voulait se parler entre collègues, on se cachait des caméras. Je me sentais regardée et écoutée constamment. Selon le boss, nous étions chanceux de travailler là. Je remarquais qu'il me faisait un lavage de cerveau, je me sentais tellement niaiseuse que j'avais l'impression que je ne pourrais jamais me trouver une autre job. Ma vie a été mise en danger à plusieurs reprises avec de gros manques de sécurité. L'atteinte à ma dignité, l'irrespect, l'impolitesse, l'esclavage, mais aussi la méconnaissance de mes droits ont fait décroître mon estime de moi. Je constatais souvent que j'éprouvais une baisse du plaisir au travail, une peur constante de "mal faire". L'angoisse est apparue et m'a hantée longtemps. Je ressentais un stress qui a perduré même après ma démission. Je suis partie de cet emploi et j'avais une mononucléose, je crois que tout ce que j'ai vécu a eu une incidence sur ma santé". Anonyme